Le roi voilé

De Laurel Aymeric AKPO
A
Honorine ODONHITAN,
Mes parents et éducateurs, en signe de gratitudes.
Chapitre 1 
J’ouvre les yeux. Je ne vis rien, rien du tout. Tout autour de moi était noir. Je ne savais même pas si j’étais dans une salle obscure ou s’il faisait nuit. Je ne savais aussi même pas si j’étais debout contre un mur ou si j’étais couché. Je ne savais également pas dans quelle direction était dirigé mon corps. J’étais juste là. Ce que je sais, c’est que je suis là, au milieu de nulle part. Je ne sentais pas mes membres. Je ne savais plus quoi faire. Je dus attendre. Combien de temps ? Je ne sais même pas. Au bout d’une éternité, j’entendis un grincement et je vis une lumière. C’est à ce moment-là que je su que j’étais dans une case. Une personne entra. J’ignorais qui s’était avant d’entendre sa voix. C’était un homme, la quatre-vingtaine environ. Il vint se placer au-dessus de ma tête. Je le regardai et il me regarda. C’est à ce moment-là que je sus que j’étais couché au sol et que mon corps regardait le ciel. Je détachai mon regard du vieil homme et je parcourrai la case. Elle avait une forme ronde. Les murs étaient en terre battue. Le toit couvert de chaume portait tout comme les murs des talismans, des symboles mystiques, des tissus de couleurs noires, rouges et blanches, des cauris et bien d’autres objets relevant du spirituel. Au sol, à quelques mètres de moi, étaient posés des canaris dont j’ignorais le contenu. Tout ceci m’apprit que j’étais dans la case d’un spiritualiste traditionnelle.
-Bon retour parmi nous, mon enfant, fit le vieillard.
Sa phrase me sortit de ma rêverie et de ma petite visite des lieux. Mais, on ne souhaite un bon retour à une personne que lorsque ce dernier revient d’un voyage. Cela veut dire qu’il y a quelques heures ou même des jours que je dors. Je lui demandai alors la raison pour laquelle il me souhaitait un bon retour avec un air de soulagement. En guise de réponse, il montra du doigt mon bras droit et mon ventre et dit:
-Tu as toujours mal ?
Sa question me poussa à regarder dans la direction de mon ventre puis de mon bras. J’avais mon bras droit à moitié et mon ventre portait à sa surface une blessure, très énorme. Je voulu lui demander d’où venaient tout ça quand la porte de la case s’ouvrit et laissa entrer une femme et une autre puis un petit garçon. L'une des deux femmes était jeune alors que l'autre était vielle. Le jeune garçon resta coller à la porte et depuis sa position il me fixait des yeux. Son regard me rappela qui je suis ou du moins qui j'étais. 
En réalité, on m'appelle Joseph. C'est le prénom que mes parents m'ont donné à ma naissance. La vielle femme, c'est ma mère et la deuxième, ma femme, la mère de mon fils Junior. Celui-là même qui me regardais depuis le pas de la porte. Je le regarde. Il a l'air si innocent. Mais ne l'est-il pas? Je me sens si coupable, moi qui avais voulu le sacrifier il y a un moment. Je crois qu'il ne va jamais me pardonner. 
Le guérisseur me regarda encore et me dit que le moment était venu pour moi de dire la vérité sinon je n'aurai jamais la paix. Quelques mois plus tôt, je lui aurais demandé de quelle vérité il parle, mais là je me vois coincé. Je n'ai vraiment pas le choix. Je tournai mon regard vers ma mère et ma femme. Je regardai mon fils et le féticheur. Et alors que je me mis à parler. 

Chapitre 2
C'était il y a 3 ans maintenant. Je ne sais pas si tu te rappelles. En son temps, je t'avais parlé de mon ami Hubert. Je ne sais pas si tu te rappelles ce jour où normalement je devais être au marché et que tu es revenue à la maison et tu m'as trouvé: les deux pieds posés sur la table, un sourire aux lèvres, moi, les yeux rivés sur la télé en train de regarder mon émission préférée. Et tu es rentrée. Puis tu m'as demandé ce que je faisais là, pourquoi je n’étais pas au marché. Que t’avais répondu chérie ? J'espère que tu te rappelles ma réponse. Sinon rappelle-toi que je t'avais dit que j'avais fait la rencontre d'un ami qui était si cher , un ami avec qui j'avais bossé en classe, un ami avec qui j’avais travaillé tout au long de mon enfance, celui-là même qui m'a conduit là où je suis aujourd'hui. La lettre que je t'avais laissée sur la table je ne sais pas si tu l'as lu mais je voudrais que tu la relises encore et encore. J'y avais inscrit les mots suivants :

Ma chérie,

Je dois te laisser ces mots pour t'expliquer ce qui se passe vraiment dans ma vie en ce moment. Mon ami Hubert m'a trompé, et sans le savoir, je me suis retrouvé pris dans une réunion sombre où j'ai été conditionné à sacrifier mon propre père pour sauver ma vie. Depuis ce jour, je vois mon père partout, hantant mes pensées et me traumatisant, cherchant sans doute à se venger de ce que je lui ai fait.

Je sais que cela semble fou et égoïste, mais je fais tout mon possible pour échapper à cette obscurité qui me tourmente jour et nuit. Je me sens désespéré et terrifié, et je n'arrive pas à trouver de solution à cette malédiction qui m'accable. Si tu lis cette lettre, sache que mes actes ont eu raison de moi. Cette lettre a pour but de t'apporter un peu de précision au cas où je ne m'en sortais pas.

Je t'aime plus que tout au monde, et je ne veux pas que cette situation te détruise. S'il te plaît, j'aimerais dire que je regrette mes choix, mais ça ne serait pas honnête puisque actuellement je continue dans les mêmes choix pour pouvoir être sauvé.
Avec tout mon amour,
Joseph

Ces mots-là sont des mots de regret. Je regrette amèrement ce que j'avais fait ou je dirais ce que j'ai fait. Je me retrouve aujourd'hui dans cet état parce que je n'ai pas voulu accepter ce que Dieu m'avait donné. Je voudrais que mon histoire serve de leçon à toutes ces personnes-là qui croient que faire confiance à l’ami qui apparaît tout à coup un jour après avoir disparu depuis très longtemps pourrait sauver leur vie.
Tout ceci n'a peut-être pas de sens parce que suivre un ami qui vient d'apparaître tout à coup ne semble pas avoir des répercussions négatives sur le futur. Mais lui, il est venu et je me retrouve aujourd'hui avec la moitié de mon bras droit et une grosse plaie au ventre.
Il y a de cela 3 ans je n'étais qu'un commerçant. Un commerçant qui cherchait à joindre les deux bouts en vendant ces articles-là qui coûtent peut-être moins cher ou peut-être plus cher. Je me rappelle que je l'avais rencontré un matin alors que j'avais une livraison très importante à faire. Je marchais très rapidement pour ne pas louper mon rendez-vous. Et là un tourbillon faisant son entrée en scène m’arracha mon chapeau ou je dirais plutôt mon képi. Et au lieu de le déposer tout près de moi, il l'envoya loin, et le déposa au centre de l’autoroute.
Dans ma précipitation pour le récupérer, je faillis me faire renverser par un véhicule. C’est alors que furieux, il fit son entrée dans ma vie. Elégamment habillé, il sortit de sa bagnole. Sur le point de me crier dessus, il reconnut mon visage. Et c’est alors qu’il m’appela par mon nom : Joseph.
Je soulevai les yeux et je vis que c’était Hubert. Il avait beaucoup changé et il avait l’air d’avoir réussi sa vie. Lorsque nous étions sur les bancs, il était quasiment nul dans toutes les matières et ne faisait jamais ses devoirs de maison. Je n’avais jamais imaginé qu’il pouvait devenir riche un jour jusqu’à s’acheter une voiture. Il se rapprocha de moi et me tendit la main avec un large sourire aux lèvres. Je lui serrai la main et on se salua. J’ai appris ce jour-là qu’il était revenu aux bercails pour certains contrats qui aideront son entreprise à grandir. Il prit aussi de mes nouvelles et dit :
Je vais te proposer quelque chose. Je suis impliqué dans plusieurs nouvelles affaires avec des partenaires qui offrent des opportunités incroyables. J'aimerais t'en parler davantage. Que dirais-tu de prendre un rendez-vous demain pour en discuter ?
Je répondis affirmatif à son invitation. J’étais à la fois curieux et reconnaissant face à cette offre instantanée et inattendue. Mon instinct me disait que cette rencontre n'était pas une simple coïncidence. Nous nous sommes ensuite dit au revoir et Hubert me laissa sa carte de visite. 
Ce jour-là, je réglai rapidement mes demandes de ventes et je rentrai chez moi au plus vite. C’était ce jour-là que tu étais revenue de tes occupations et tu m’as trouvé : les deux pieds posés sur la table, un sourire aux lèvres, les yeux rivés sur la télé en train de regarder mon émission préférée. Et tu m’avais demandé ce que je faisais là alors que je devrais être au marché. J’ouvre ma bouche et j’affirmai que j'en avais vraiment marre de cette vie. Tu répondis :
Encore ? Qu'est-ce qui s'est passé aujourd'hui ?
A ta question je donnai cette réponse :
Tu vois même mes égaux là-bas dehors ? Ils sont dans de grosses voitures. Aujourd'hui, j'ai même rencontré un ancien camarade, qui est devenu très riche. Il n'a même pas fait d'études comme moi, mais ce gars-là a réussi, il roule dans une grosse voiture.
Et comme toute bonne femme devrait le faire tu répondis :
Tu ne devrais pas te comparer aux autres, chacun à son étoile, chacun à son tour chez le coiffeur et chacun à sa vie.
Cette phrase-là était un conseil que j’aurais dû suivre. Mais Hubert et notre rendez-vous obsédaient mon esprit. Je n’avais même pas dormi de la nuit.

Chapitre 3
Notre rencontre se passa sans encombre. Nous avons passé tout le temps à ressasser les souvenirs de quand nous étions jeunes. Je me rappelle que ce jour-là, il avait évoqué une chose que je ne serai pas prêt d’oublier. Il avait rappelé l’histoire de l’un de nos instituteurs lorsque nous étions au primaire. C’était une des personnes que j’admirais beaucoup. Je profite donc de l’instant pour saluer toutes ces personnes qui se donnent corps et âme pour que nous ayons un avenir radieux.       
A l’issue de notre rencontre, Hubert me donna une enveloppe. Cette enveloppe contenait une somme de 100000F. Et il me dit que c’était juste pour mon transport. Son attitude me laissa stupéfait et cela réveilla encore ma curiosité. Avant de se quitter, il promit de me rappeler au cas où il trouverait une place pour moi dans sa société.
Après notre rencontre, je suis rentré directement à la maison. En rentrant du marché ce jour-là, tu m’avais trouvé coucher au lit. Une dispute a failli éclater entre nous mais moi ce jour-là je n’étais pas du genre colérique. Je t’avais demandé de laisser de côté les problèmes avant de t’exposer les raisons pour lesquelles je n’étais pas sorti travailler. 
Après m’avoir écouté, tu démontras ce soir que tu n’étais pas d’accord avec moi. Selon toi, donner 100000 francs à une personne en affirmant que c’était juste pour le transport de ce dernier avait quelque chose de suspect. J’aurais du t’écouter. Mais au lieu de cela, je me servis de cette somme dont j’ignorais les vrais raisons pour lesquelles, elle a atterrit dans ma main.
Cet argent a été d'une grande utilité pour moi. Je l'utilisai pour résoudre quelques problèmes que j’avais et, en attendant l’appel d’Hubert, je continuais mon business comme à l’accoutumé.
Un dimanche, comme je l’espérais je reçus un appel d’Hubert. Je me suis donc préparé et je l’ai rejoint comme il me l’avait demandé dans le restaurant de la première fois. Tout s’est passé comme la première fois; les souvenirs et autres. J’avais même cru qu’il m’avait appelé pour parler affaire avec moi. D’ailleurs quand je le lui avais demandé, il répondit qu’il était en négociation avec ses contacts. Nous sommes donc restés là à se remémorer les anciens souvenirs pour se replonger dans le passé. Au moment de se séparer, Hubert me remit une somme de 150 000 F avant de dire :
Je sais combien ça peut être difficile pour bien, moi-même je suis passé par là. Donc en attendant que je te trouve quelque chose, tu peux te débrouiller avec ça pour subvenir au besoin de ta famille.
Après l’avoir remercié, Je suis rentré à la maison pour t’annoncer la nouvelle. Mais tu ne partageais pas le même sentiment de fierté que moi. Puis des mois sont passés. Je n’avais plus reçu des nouvelles d’Hubert. J’étais sur le point d'accepter qu’il ne pouvait rien faire pour moi, lorsque je reçu un appel venant de lui me donnant rendez-vous le soir suivant.
C'est ainsi que je me suis rendu au restaurant où nous avions l'habitude de se voir. Après les salutations d’usages il me demanda de prendre place. Ce que je fis. Il avait l'air un peu plus sérieux que les fois précédentes où on s'étaient vus. C’est ce jour-là qu’il fit de moi le propriétaire de cette petite agence de livraison à domicile. J’avais signé le contrat après avoir parcouru toutes les lignes du document. J’avais signé ma propre condamnation à travers ce contrat. Ce document me lie directement à lui. Si à l’époque je l’avais su, j’aurais tout fais pour éviter que cela arrive.
Au cours des mois qui ont suivis la signature de contrat, l’agence de livraison à domicile resta mon seul point de revenu. C’est grâce à la somme que je gagnais que je subvenais au besoin de ma famille.
Un soir alors que je me préparais pour quitter l’agence après une dure journée, je reçus un appel d’Hubert. Il disait qu'on doit se retrouver à 23h au lieu habituel, pour que je signe le contrat pour prendre la place de celui qui avait déserté le groupe. Il disait qu’il sera là avec le reste des membres de l’association, et peut-être que j’aurai l'occasion de rencontrer le boss. Je me dépêchai donc pour rentrer chez moi histoire de me changer et prendre une douche. Il fallait aussi avoir un air présentable. 
Chérie, je me rappelle que tu n’étais pas d’accord pour que je sorte à une heure tardive. Mais le goût de l’argent bloquait mes leçons de morale et de civisme. Je sortis donc et me dirigeai vers le lieu du rendez-vous. A mon arrivée au restaurant, Hubert m'intercepta à la porte et au lieu de me faire entrer dans le restaurant, il ouvrit une autre que le Joseph que j’étais n'avait pas encore vu. 
Nous pénétrions donc dans une pièce étrange. Dès qu'Hubert ferma la porte derrière nous, j’eus l'impression d'être transporté dans un autre univers. Mais je continuai d'avancer jusqu'à un niveau supérieur, où je remarquai des bougies rouges disposées au sol, et des individus vêtus de noir assis tout autour. Une chaise se trouvait au centre du cercle. Je lui demandai :
Hubert, qu'est-ce que c'est que cet endroit ? Où sommes-nous ?
Il me répondit :
Avance, ne sois pas effrayé.
A cet instant-là je n'avais plus de doute. Mais malgré la peur qui me nouait les entrailles, je pris mon courage à deux mains et continuai d'avancer. Lorsque j’atteignis le niveau où les hommes vêtus de noir étaient assis, ils se levèrent tous et m’indiquèrent la chaise, comme pour me signifier que je devais m'asseoir. Je traversai la pièce et je m’assis sur la chaise. C’est alors qu’Hubert parla en ces termes :
Bonsoir mes chers frères de la confrérie. Je vous présente Joseph, un ami qui est à la recherche du bonheur. Il est là ce soir pour prendre contact avec le cercle. Souhaitons-lui la bienvenue. 
C’est alors qu’ils se dirigèrent l’un après l’autre vers moi pour me serrer la main. Après qu’ils m’aient tous salué, Hubert continua
Il est temps mes frères. Invoquons le grand maître.
Ils joignirent alors leurs mains, formant ainsi un cercle. Hubert se mit à parler dans une langue étrange. Quand il eut finit, un vent se mit à souffler et tous ensemble ils se mirent à chanter. Après une dizaine de minutes, tout devint calme et le grand maître fit son apparition derrière moi.

Chapitre 4
Le grand maître, Tingnékpon, était vêtu d'une robe noire ornée de symboles mystérieux. Son visage était partiellement dissimulé par une capuche, ce qui rendait difficile l'identification de ses traits. Les membres de l'organisation, prosternés devant le grand maître Tingnékpon, observaient silencieusement cette scène, témoins de mon l'acceptation dans leurs rangs. J’étais stupéfait de voir Tingnékpon, le prétendu grand maître, se tenir derrière moi. Mon cœur battait la chamade alors que j’essayais de comprendre ce qui se passait. Le grand maitre rompit le silence en disant :
Bonsoir, mon fils. Je suis heureux de te voir ici.
Je lui demandai :
Qu'est-ce que tout cela signifie ? Qu'est-ce que je fais ici ?
S’adressant à Hubert :
Hubert, tu ne lui pas tout expliquer ?
Hubert répondit: 
Grand maitre, avec le cas Charles que je devais gérer, je n'ai pas eu le temps de le faire.
Le grand maitre reprit alors :
D'accord. Ne t'inquiète pas, Joseph. Tu as été choisi pour faire partie de notre cercle. Nous avons reconnu en toi des qualités spéciales, et nous pensons que tu as un grand potentiel.
Je lui répondis : 
Mais je ne comprends pas. Quel est ce cercle ? Et pourquoi moi ?
Il me répondit :
Notre cercle est une organisation secrète qui travaille dans l'ombre pour protéger nos intérêts et atteindre nos objectifs communs. Nous avons besoin de personnes talentueuses et déterminées comme toi pour nous aider à réaliser nos projets.
Je ne sais pas si je suis prêt à m'engager dans quelque chose d'aussi mystérieux. Je veux juste offrir un meilleur avenir à ma famille.
Je comprends tes préoccupations, Joseph. Mais crois-moi, en rejoignant notre cercle, tu pourras non seulement réaliser tes propres ambitions, mais aussi protéger ta famille et leur offrir une sécurité dont tu n'as jamais rêvé. Joseph, prends le temps de réfléchir. Hubert vas te donner ce qu'il faut au cas tu décides de nous rejoindre.
J’étais déchiré entre mes aspirations personnelles et les promesses de Tingnékpon. Je savais que cette décision pouvait changer ma vie et celle de ma famille, mais j’avais aussi peur des conséquences qui vont suivre si je rejoins cette secte.
 Sans dire un mot de plus, Tingnékpon fit signe à Hubert de me raccompagner à la sortie. Je me levai, encore sous le choc de ce que je venais de vivre. Je quittai la pièce, laissant derrière moi les hommes vêtus de noir et Tingnékpon, le grand maître. Avant de se séparer, Hubert me remis un petit coffre qui contenait une bague que tous les membres de confrérie avec aux doigts lors de la réunion et au fond du coffre, il y avait une feuille vierge avec un stylo. De retour chez moi, je ne pouvais m’empêcher de penser à ce qui venait de se passer. Il avait proposé de m'aider. Je me suis dit que c'était peut-être quelque chose de potable. J'ai donc décidé de le suivre mais je ne savais pas qu'il cachait quelque chose. Et voilà, je suis là aujourd’hui. Mais vous savez quoi, je n’aurais pas rejoint la secte, une chose m’avait déjà ajouté dans leur rang : le soutien que me procurait Hubert; les 250000 et agence de livraison à domicile. A ça, ils avaient ajouté la mort possible de chacun des membres de ma famille en commençant par mon fils.
A ce stade-là, je n’avais plus le choix. Je me suis rendu le soir suivant dans leur QG. Au fil de la soirée, je fus initié aux secrets et aux rituels de l'organisation secrète. Les membres les plus expérimentés m’enseignèrent les protocoles complexes, les codes de conduite stricts et les connaissances ésotériques nécessaires pour naviguer dans ce monde obscur. Je découvris que chaque symbole, chaque geste et chaque mot prononcé avait une signification profonde et cachée. Le rituel exécuté semblait réveiller des forces invisibles, ajoutant une aura de mysticisme à l'ensemble de l'expérience.
Pendant cette soirée d'initiation, Joseph que je suis désormais se lia d'amitié avec certains membres de l'organisation, découvrant leurs histoires et leurs motivations pour avoir rejoint les rangs de cette confrérie secrète. En majeure partie, ils étaient en quête de pouvoir, chacun avait fait au minimum un sacrifice avant de commencer à bénéficier des bienfaits de la confrérie. À la fin de l'initiation, le grand maitre Tingnékpon prit la parole et dit :
Bienvenue dans la famille mon fils. 
Merci grand maître, lui répondis-je.
Hubert t'a Remis un papier vierge et un stylo n'est pas, est-ce qu'il t'a expliqué ce que tu devais faire de ça ?
Pas encore grand maître.
Ce n'est pas grave. Sur ce beau de papier, tu vas écrire un nom qui va être soit celui de ton père, ta mère, ta femme ou ton propre enfant. Cette personne sera la fondatrice de ta vie de désormais.

Chapitre 5
Je suis rentré chez moi sous le choc de cette nouvelle. Tout ce que j’ai passé mon temps à fuir vient de me rattraper. Je suis maintenant obligé de sacrifier un membre de ma famille. Soit mon père, soit ma mère, soit ma femme, soit mon fils. Passé le délai, ce sera moi que le cercle prendra. 
Que dois-je faire ? J’ai à l’époque voulut vous en parler mais je n’avais pas le choix, je devais me taire et garder le secret pour moi-même. Etant donné que les intérêts du cercle passaient avant ceux des membres, je fus obligé de céder. Le dilemme auquel j’étais confronté devenait de plus en plus épineux, et je sentais une pression monter en moi. Mon engagement envers l'organisation était inébranlable. Je n’avais donc pas le choix. Te sacrifier chérie signifie la perte de mon mariage. Il en est de même pour mon fils et pour toi maman. J’étais à la croisée des chemins, déchiré entre deux voies qui semblaient toutes deux insoutenables. Je comprenais que ma décision aurait des répercussions durables sur ma vie et sur les vôtres. Le voile obscure de l'organisation s'épaississait autour de moi, m'enveloppant de doutes et de peurs. La route devant moi était incertaine. Les jours qui suivirent furent remplis d'angoisse et de nuits sans sommeil. Chaque seconde qui s'écoulait me rapprochait de l'échéance fatidique où je devrais prendre une décision. Les heures passaient rapidement, presque de manière irréelle, tandis que je me perdais dans une spirale de réflexions et de dilemmes moraux. 
Finalement, le jour fatidique arriva. Je me retrouvai face à face avec les dirigeants de l'organisation, qui attendaient ma décision avec impatience. Mon cœur battait la chamade, mes mains étaient moites, mais je savais que je ne pouvais plus reculer. J’ai donc transcris sur le papier le nom de mon père.
La réalité m'attendait au tournant, prête à m'accueillir avec ses avantages et ses conséquences inévitables. J’étais conscient que ma vie serait à jamais transformée, que les relations avec mes proches pourraient être ébranlées à cause de tout ça, et que le poids de mon secret ne me quitterait plus jamais. Mais malgré toutes les incertitudes et les tourments qui m'attendaient, J’avais fait ce que je pensais être juste et mieux pour moi. J’avais suivi mon propre chemin, même s'il était semé d'embûches et de sacrifices. J’avais choisi de faire face à la réalité, quel qu’en soient les conséquences. 
Vous savez, la plupart des choses qui nous nuisent sont les choses que nous faisons fréquemment. Le cercle a donc ainsi décidé de tué papa en se servant de sa profession. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Hubert était venu le voir la veille du jour où il a rendu l’âme. Il avait prétendu avoir une réunion importante qui devrait se tenir dans le nord du pays et puisque le chauffeur qui devait le conduire lui et sa secrétaire avait eu un problème de santé et qu'il était actuellement à l'hôpital, donc malheureusement il ne pourra plus les y amener. Vu que le jour était proche il n’avait d’autre choix que s’adresser à l’unique transporteur qu’il connaisse le mieux et en qui il avait confiance; ce transporteur qui n’était personne d’autre que papa. 
Quand notre dernière heure est proche, on a souvent du mal à s’interdire certaines choses. Il est vrai que papa n’avait pas accepté ce marché sur le champ mais il avait fini par céder après une intervention spirituelle du cercle et c’est ainsi que le lendemain à l’aube papa avait pris ce chemin à sens unique qui le conduisait vers sa perte. Le cercle avait la capacité de le tuer directement sans se déranger mais il fallait une couverture physique pour cacher tout ce qui passe dans l’ombre. Au même moment c’était une façon pour lui d’assurer ses arrières.
Ce jour-là, papa est parti mais il n’est plus jamais revenu. Tout s’était déroulé rapidement. Le départ, l’accident, l’appel de l’hôpital puis le désolé du docteur. C’est là que j’ai su que tout était fini. Je venais de faire l’échange le plus insensé de ma vie: la vie de mon père contre de l’argent et sans la paix du cœur. 
Je ne sais pas si vous vous rappelez. J’ai été le seul. Oui, la seule personne qui a été en contact avec le corps de papa à la morgue. Je me suis chargé de son nettoyage et de préparation pour l’enterrement. Eh bien, croyez-moi, j’avais reçu des instructions et je devais exécuter les ordres. Le cercle m’avait demandé de faire un prélèvement sur le corps de mon père. Je l’ai fait mais ce fut la seule chose qui m’a trahi. Au fait, c’était pour protéger ce secret que je voulais enterrer au plus vite mon père. Il est vrai que j’ai réussi à le faire mais derrière moi, ses frères ont déterré son corps puis ils ont des rites. Ceci avait pour but d’inciter son esprit à la vengeance. Le marabout du village les avait aidés pour le faire. Il avait ordonné à l’esprit de papa de traquer le responsable de sa mort et l’avait équipé d’une machette et d’une chicotte, symbole du pouvoir de vengeance et la protection dans l'au-delà.
Ils ont réussis et des années après sa mort donc quelques semaines plutôt, son esprit m’a rendu visite. 

Chapitre 6
C’était une nuit. Après les obsèques de papa, le grand maître de la confrérie tellement impressionné par mes efforts et ma dévotion m’avait remis une somme de 25 millions comme une marque de reconnaissance. Toutefois, il m’avait rappelai l'importance d'utiliser cet argent avec sagesse pour ne pas attirer l'attention des gens. Sachant que le secret de la confrérie devait être protégé à tout prix, j’ai donc décidé de suivre les conseils du grand maître. J’avais commencé à développer l’agence, et grâce à mon travail et des avantages que la confrérie m’offrait, j’avais réalisé des bénéfices considérables. 
Après donc une année entière écoulée depuis l'enterrement de papa, j’étais compté parmi les personnes les plus riches de la sous-région. J’avais aussi acquis une connaissance approfondie des secrets de fonctionnement de la fraternité. J’étais devenu un membre respecté et influent au sein de la confrérie. Après toutes ces réussites, j’avais donc acheté une nouvelle maison pour moi et ma femme. Je pensais enfin pouvoir vivre paisiblement et profiter du fruit de mes efforts, tout en continuant à servir et à protéger les secrets de la confrérie avec une prudence renouvelée.
C’est ainsi qu’un soir, mon retour de la réunion de la fraternité fut saluer par la présence de l’esprit assoiffé de vengeance de papa. Ce soir-là après la réunion, les membres se détendirent et partagèrent quelques verres de whisky. J’étais satisfait de cette soirée et je me sentais pleinement intégré à la fraternité. Alors que je rentrais à la maison, j’ai repassé dans ma tête les événements qui avaient jalonné mon parcours jusqu'à présent. La réussite grâce à la fraternité et mon ascension personnelle me donnaient un sentiment d'accomplissement. Cependant, je n'oubliais pas que tout cela était grâce à mon père. Une petite voix dans ma tête me rappelait que j’avais remporté le fameux combat contre mes oncles et que même mon père serait sûrement fier de la vie que j’ai maintenant.
Cette nuit-là, la route était calme alors que j’étais à bord de ma nouvelle voiture. Les lampadaires éclairaient la route. Tout étais silencieux et même la nature semblais me donner raison tandis que je songeais à l'avenir et aux défis qui m’attendaient. Je savais que le chemin que j’ai choisi n'était pas sans risques, mais j’étais déterminé à poursuivre mes rêves tout en restant fidèle aux principes de la fraternité. Arrivé devant chez moi, mon papa était assis devant la porte et m'attendait. Il m’avait dit ce soir-là qu’il a toujours attendu le moment où il aurait pu se présenter devant moi. Il portait les mêmes vêtements que lors de son accident, et il pleurait, avec sa blessure à la tête et le sang sur tout son corps. Au départ je l’avais pris pour une hallucination mais je me trompais. Après mon entrée dans la maison je suis allé à la salle de bain dans le but de me laver mais papa m’y attendait. C’est à ce moment-là que j’ai compris. Il me posa des tas de questions dont la seule réponse plausible et qui d’ailleurs raisonnait dans mon esprit est l’argent. Des questions du genre « Pourquoi tu m'as fait ça ? Pourquoi tu m'as sacrifié pour le bien de la terre Joseph ?... Je ne t'ai pas éduqué ainsi, et je t'ai donné tout ce que je pouvais... Qu'est-ce que je t'ai fait de mal pour que tu me fasses ça ? » 
Ce soir-là, mon fils si tu étais plus éveillé tu aurais compris ce qui se passait. Toi aussi d’ailleurs chérie. Cette bague que tu as jetée par jalousie dans les toilettes devait me protéger contre lui. Je n’avais plus d’issue de secours mais le grand-maître m’en trouva deux. Je devrais choisir entre te sacrifier ou aller prendre une petite quantité de sable de l’endroit où papa a été enterré. 
Je ne voulais plus avoir du sang sur la main. J’ai donc opté pour la seconde option. C’est ainsi que j’ai pris la route mais en chemin l’esprit de papa m’est apparu encore. Il m’a fouetté correctement et pour finir il me coupa le bras. Ce qui a provoqué l’accident que j’ai eu.
« Voilà je vous ai tout dit. Je peux dormir en paix maintenant. Le voilà, le voilà. Il est venu me chercher. A dieu chérie. A dieu maman. A dieu mon fils. Sachez que je vous aime. » Ce fut ses derniers mots avant de rendre l’âme. Le vieil homme se retira, laissant la mère, la femme et le fils du défunt seul. Tous les trois étaient sans mots.

Epilogue
Même s'il y avait déjà des soupçons, sa femme était dévastée par la vérité et ne comprenait pas les choix de Joseph. Ça ne ressemblait pas à l'homme qu'elle avait aimé. Le jour de l'enterrement de Joseph, selon les traditions, les membres de la famille se réunirent autour de sa tombe, le cœur lourd mais déterminés à respecter les rites ancestraux pour protéger la famille contre un possible retour de Joseph. Le grand marabout dirigeait la cérémonie, rappelant à tous l'interdiction de pleurer ici, car Joseph avait lui-même cherché sa propre mort. Les visages de certains étaient empreints de tristesse, mais ils gardaient des larmes à l'intérieur. Sa mère avait honte et ne comprenait pas les choix de son fils. Elle qui s'était opposé à tout la famille de son mari.
La cérémonie toucha à sa fin, et chacun se dispersa avec un mélange de douleur et de soulagement pour d'autres. Ils savaient que la malédiction ne se propagerait pas, mais ils ne pourraient jamais oublier la tragédie qui avait touché leur famille. La veuve décida de retourner chez elle, déterminée à reconstruire sa vie et celle de son fils, désormais privé de son père. Elle savait qu'elle devrait faire face aux rumeurs et aux spéculations, mais elle ne laisserait pas cela définir qui elle était avoir une influence sur l'avenir de son fils. Entourée de soutien et d'amour, elle trouva la force de surmonter son chagrin et d'aller de l'avant grâce à la prière.
La légende de Joseph, connu comme "Le Roi Voilé", marqua les esprits et inspira d'autres à ne pas se laisser emporter par la peur et l'ignorance. Son histoire servit de rappel que les choix que nous faisons peuvent avoir des conséquences inattendues, et qu'il est important de faire preuve de prudence et de discernement. Ainsi s'achève l'histoire de Joseph, un homme dont la vie fut bouleversée par des forces mystérieuses et qui seul sait dans quel monde il se trouve aujourd'hui et dans quelles conditions.    



De Laurel Aymeric AKPO

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